- OLIGARCHIE
- OLIGARCHIEOLIGARCHIEAu sens originel, l’oligarchie caractérise une forme de régime qui s’est développée dans la Grèce antique. À un moment donné de leur histoire, certaines cités grecques ont appliqué le système consistant à se laisser gouverner par un petit nombre de citoyens (oi oligoi , «ceux qui sont en petit nombre»). À Thèbes, l’accès au Conseil est réservé aux propriétaires terriens. À Sparte, c’est le Conseil des vieillards, élus à vie parmi les chefs des grandes familles, qui dirige la cité. Un système comparable s’est développé à Athènes aux IVe et Ve siècles avant notre ère: ce sont d’abord les Eupatrides, chefs des vieilles familles propriétaires de terres, qui s’attribuent le pouvoir; puis le parti oligarchique élargit la participation politique aux possédants qui atteignent un certain niveau de fortune, quelle que soit la nature de celle-ci. L’oligarchie s’oppose d’une part à la monarchie et à la tyrannie, régimes dans lesquels le pouvoir est détenu par un seul, d’autre part à la démocratie qui se caractérise par la participation du peuple à la vie politique. Quant à l’aristocratie, toujours dans l’acception antique, elle constitue une forme particulière de l’oligarchie, puisque le gouvernement de quelques-uns y est réservé non pas aux plus riches (ploutocratie), mais aux plus résistants, aux meilleurs.À l’époque contemporaine, le concept d’oligarchie a perdu une bonne part de sa rigueur théorique. L’introduction du suffrage universel fait que les dirigeants politiques se considèrent comme issus de la volonté populaire, même lorsqu’ils ne représentent en réalité qu’une coterie de quelques grandes familles. En outre, la constitution d’une oligarchie n’est pas forcément liée à l’hérédité ou à la propriété foncière. Ainsi, les théoriciens de l’élite, tels V. Pareto, C. Wright Mills ou G. Mosca, mettent l’accent sur le pluralisme et la circulation des élites qui se confondent alors avec les groupes oligarchiques; ces groupes rassemblent ceux qui réussissent, notamment dans le domaine politique, et qui exercent pour un temps leur activité dans les affaires publiques. La concordance entre le concept d’élite et celui d’oligarchie reste cependant imparfaite dans la mesure où le suffrage universel admet la première mais rejette la seconde. Et pourtant, on retrouve le terme d’oligarchie sous la plume de journalistes qui entendent désigner par là les équipes dirigeantes de certains États dont la tradition démocratique est fragile, le pouvoir ayant tendance à être conçu comme propriété privée du groupe qui l’exerce et s’y accroche. Le schéma est le plus souvent pyramidal: la masse de la population se soumet à l’oligarchie dirigeante, tandis que celle-ci reste elle-même subordonnée à la personne d’un chef omnipotent. Un tel système va fréquemment de pair avec les oligarchies «satellites» qui exercent leur pouvoir dans la finance, l’industrie ou le commerce; les groupes dominent alors totalement les intérêts du pays.• 1361; gr. oligarkhia « commandement de quelques-uns »♦ Régime politique dans lequel la souveraineté appartient à un petit groupe de personnes, à une classe restreinte et privilégiée.♢ Ce groupe. — Par anal. Élite puissante. Une oligarchie financière.⊗ CONTR. Démocratie, monarchie.oligarchien. f. Didac. Régime politique dans lequel le pouvoir est aux mains d'un petit nombre d'individus ou de familles; ces individus ou ces familles. L'oligarchie romaine.⇒OLIGARCHIE, subst. fém.A. —Système politique dans lequel le pouvoir appartient à un petit nombre d'individus ou de familles, à une classe sociale restreinte et privilégiée. Au XVIIIe siècle le gouvernement municipal des villes avait donc dégénéré partout en une petite oligarchie (TOCQUEVILLE, Anc. Rég. et Révol., 1856, p.114). Jusqu'à la fin du XIXe siècle, on a vécu sur une typologie des régimes politiques héritée des Grecs, qui opposait la monarchie, l'oligarchie et la démocratie. Monarchie ou gouvernement d'un seul, oligarchie ou gouvernement de quelques-uns, démocratie ou gouvernement de tous (Traité sociol., 1968, p.5):• 1. De même que dans la société actuelle l'influence de la bourgeoisie possédante et capitaliste, si elle est dominante, n'exclut pas pourtant toute influence de la démocratie et du prolétariat, de même l'État, expression et organe de cette société, est un composé d'oligarchie bourgeoise et capitaliste, de démocratie et de puissance prolétarienne.JAURÈS, Ét. soc., 1901, p.178.— P. méton. [Dans ce système pol.] Groupe restreint de personnes détenant le pouvoir. Bien que la puissance et l'argent se perpétuassent dans les mêmes familles, on tolérait l'oligarchie, parce qu'on avait l'espoir d'y atteindre (FLAUB., Salammbô, t.1, 1863, p.99). Se courber sous le sabre d'une oligarchie militaire à qui la France doit Sedan et qui, détruisant par son impéritie les forces vives de l'armée, ne tolère point les critiques sous prétexte qu'elle est «l'armée» (CLEMENCEAU, Iniquité, 1899, p.229):• 2. L'existence d'une Chambre des Lords pouvait paraître absurde à des esprits qui n'admettaient pas de représentation sans élection; Disraëli montrait que le danger était plus grand encore de l'élection sans représentation. Une oligarchie de politiciens professionnels pouvait se faire élire, et gouverner un pays sans en être l'image...MAUROIS, Disraëli, 1927, p.102.B. —P. anal.1. [Dans une entreprise, un organisme, etc.] Organisation dans laquelle le pouvoir de décider, de diriger appartient à un petit nombre d'individus; p. méton., groupe restreint de personnes détenant ce pouvoir. Dans son évolution technocratique, l'entreprise publique a perdu tout caractère socialiste. À l'intérieur elle tend à enfanter des oligarchies professionnelles (CHENOT, Entr. national., 1956, p.119):• 3. ... une petite couche d'administrateurs gérant l'institution d'en haut, et jouissant d'une stabilité complète dans leurs fonctions dont le renouvellement est automatiquement assuré par une assemblée se conformant aux indications données par les dirigeants eux-mêmes. Là encore des études (...) seraient utiles pour préciser la réalité et la portée de cette propension à l'oligarchie dans les groupes de pression.MEYNAUD, Groupes pression Fr., 1958, p.114.2. Groupe restreint de personnes dominant l'activité d'un pays dans un secteur donné. Maladie profonde d'une société où sous couleur de servir la patrie, tous les intérêts des vieilles oligarchies s'organisent en des états-majors de caste, avec l'aide de l'Église, pour reprendre, sous les formes de la démocratie, l'antique e.ploitation de la France (CLEMENCEAU, Vers réparation, 1899, p.551). Beaucoup [de journaux] furent les instruments des oligarchies occultes qui avaient intérêt à incliner l'opinion pour dominer l'État (MAURIAC, Journal 4, 1950, p.226).— [Constr. avec un adj. indiquant le domaine dans lequel s'exerce la domination] Nous formerions une oligarchie intellectuelle, d'autant plus acclamés de la foule que nous serions moins capables de la flagorner (BLOY, Désesp., 1886, p.250). Il n'y a d'obstacle au développement de la justice sociale que la coalition de l'oligarchie financière (...) avec l'Église romaine, qui prétend détenir l'universelle autorité, et s'en servir, justice ou injustice, pour l'avantage de son pouvoir (CLEMENCEAU, Vers réparation, 1899, p.382).Prononc. et Orth.:[
]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1370-72 (ORESME, Éthiques, éd. A. D. Menut, p.435). Empr. au gr.
de même sens, dér. de
v. oligarque, cf. le lat. médiév. oligarchia ca 1343 ds LATHAM. Fréq. abs. littér.:87. Bbg. DUB. Pol. 1962, p.355. — QUEM. DDL t.11. — VARDAR Soc. pol. 1973 [1970], p.275.
oligarchie [ɔligaʀʃi] n. f.ÉTYM. 1361; grec oligarkhia « commandement de quelques-uns », de oligarkhês. → Oligarque.❖♦ Didactique.1 Régime politique dans lequel la souveraineté appartient à un petit groupe de personnes, à quelques familles, à une classe restreinte et privilégiée. ⇒ Gouvernement. || L'oligarchie et l'aristocratie (cit. 3). || La démocratie et l'oligarchie (→ Balancer, cit. 24).2 Par métonymie. Un tel groupe.0 L'égalité ! Une oligarchie s'était, en 1793, fondée, qui, non contente d'avoir refusé le droit de vote aux quatre cinquièmes des citoyens — qualifiés passifs, — avait, par surcroît, accaparé, avec une jalousie féroce, le pouvoir auquel elle s'était, fût-ce par la violence, odieusement cramponnée.Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, Ascension de Bonaparte, XX.♦ Par anal. Élite puissante. || Une oligarchie d'hommes d'affaires, de hauts fonctionnaires. ⇒ Aristocratie, mandarinat.❖CONTR. Démocratie, monarchie.
Encyclopédie Universelle. 2012.